Quand je regarde ma vie…
Ma tendre enfance est basée sur l’affection, la joie, le rire et se déroule dans la maison située au ..... à Metz.
Ensuite survient, ce mauvais cadeau de mes dix ans qui me fait grandir différemment. Perdre deux frères dans une guerre quand vous n’êtes pas élevés pour vous battre, que vous n’êtes pas d’accord avec ce rendez-vous avec la cruauté et la méchanceté auquel vous convoque la Vie n’est pas une chose facile ni à accepter, ni à digérer. Notre famille est touchée en partie, mais des familles, parce qu’elles sont juives, sont décimées. Comment pouvoir penser que « c’est la vie, c’est comme ça. » La guerre est une grave maladie qui a atteint beaucoup trop de personnes. Pas de Docteur compétent face à cette maladie, mais un seul remède : la paix. La paix permet de retrouver la liberté, même s’il reste des séquelles, la maladie doit être « oubliée » pour continuer à vivre le plus normalement possible.
À cette époque, nous vivons sans jouet, mais quelle importance, l’importance est de vivre libre. Libre de vivre en paix. Libre de rire et de partager de nombreux moment avec sa famille ou ses amis. Libre de côtoyer ses voisins, même s’ils n’ont pas la même religion que nous. Libre de parler français en France ! Libre de travailler pour pouvoir manger à notre faim. Toutes ces notions sont difficilement compréhensibles pour tous les chanceux qui ne connaissent pas la guerre et ses restrictions. Nos enfants qui naissent parmi des jouets par milliers rencontrent quelques difficultés pour imaginer l’enfance de leurs parents ou grands-parents, mais ils doivent reconnaître et apprécier la chance qu’ils ont de grandir dans une France libre. À quoi serviraient tous ces jouets si la liberté de jouer leur est subitement supprimée ?
De notre temps- et c’est ce que nous avons essayé d’inculquer à nos enfants, Bruno et moi – l’important était la famille. Cela se perd de plus en plus de nos jours, j’espère que ce manuscrit ravivera cette notion dans vos chaumières, car en cas de coup dur, les membres de la famille se serrent les coudes et sont présents. Cela doit rester valable même par temps de paix !
Pourquoi ai-je connu souvent des moments de joie et de bonheur dans ma simple vie ? Parce que je suis contente de tout et que j’apprécie chaque chose et chaque moment à sa juste valeur.
De la rue des Piques à la rue des Petites Sœurs, j’ai grandi et mûri à Metz. C’est une ville que j’affectionne énormément et que je connais par cœur. C’est une ville, qui comme tous les Messins présents pendant les années de guerre, a souffert.
Aujourd’hui, j’ai 77 ans, la ville de Metz est fleurie, elle est très jolie, Metz a pansé ses blessures de guerre. Metz a connu des moments de grande souffrance, mais ça ne se voit pas. Finalement ma vie ressemble beaucoup à ma ville natale.